LE JOUR PRECIS OU J'AI APPRIS QUE J'ÉTAIS JUIF

"Le jour précis où j'ai appris que j'étais juif".

Un jour de sortie de classe de l'école primaire que je fréquentais, j'entendais deux écoliers plus âgés que moi se disputer, l'un d'eux lança à l'autre:

SALE JUIF

J'étais étonné et je ne connaissais pas ce terme.

L'un était musulman et l'autre juif, c'est plus tard que j'ai compris la signification de différence entre religions.

C'était à l'école primaire de la rue de Pau (école de Pau) à Rabat j'avais 10 ans en 1959,  j'étais en CM1. Je me souviens du jour du mercredi 11 mars 17 heures, nous sortions de l'école pour rentrer à la maison. Le lendemain c'était jeudi et n'avions pas de cours.

Je suis rentré chez moi pas trop loin à l'impasse Henri Popp (aujourd'hui rue Moulay Ismaïl). Je m'empresse de poser une question à ma mère Alice en travaillant sur sa confection de couturière avec sa machine à coudre.

J'avais hâte de lui raconter ce que j'ai entendu il y a un quart d'heure entre ces deux élèves de CM2. J'avais besoin de précisions.

Mon fils, ne fais pas attention à ce qu'on entend par-ci et par-là.

C'est un terme que des gens (sale juif) renvoient à une personne qu'ils n'aiment pas, ou pour la rabaisser.

D'ailleurs même dans plusieurs pays musulmans ils l'emploient pour crier leur haine entre eux.

Mais maman c'est quoi "juif".

C'est au x^e siècle. Issu, par l'intermédiaire du grec et du latin, de l'hébreu yehudi, de même sens.  "juif" fait référence à une combinaison d'ethnicité, de culture, de "race" et de religion, un peu tout à la fois.

Personnes appartenant à la communauté israélite, au peuple juif.

Sur le mot Juif : "Juif" n'est pas un terme offensant lorsqu'il est utilisé comme nom. C'est un terme offensant lorsqu'il est utilisé comme verbe.

Même on entend parfois, sale arabe, sale bougnoule, sale goy (Celui qui n'est pas juif et, notamment, le chrétien ).

Voila mon fils as-tu compris? Il existe plusieurs religions sur terre. 

Ici à Rabat et au Maroc il y a toutes ces religions et dans ton école il y a des chrétiens, des musulmans et des juifs.

Et d'ailleurs il y a des églises, des mosquées et des synagogues.

Il faut vivre harmonieusement avec tous et se respecter.

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Ma mère Alice nous disait souvent qu'un jour il faudra partir ailleurs, et elle faisait le vœux suivant "l'an prochain à Jérusalem" et il ne fallait pas le crier trop fort.

Les Juifs berbères ou Berbères juifs sont les communautés juives du Maghreb qui historiquement parlaient les langues berbères et/ou sont d'origine berbère. Entre 1950 et 1970, la plupart ont émigré en France, en Israël et aux États-Unis.

Le quartier où on habitait et à l'impasse Henri Popp il n'y avait que des familles juives en majorité. 

Pas loin à 300 mètres se trouvait e quartier du mellah entouré de remparts de  10 mètres de hauteurs. C'est ici que vivaient les nombreuses familles juives. Plus de 10 synagogues s'y trouvaient.

Toutes les ouvertures avaient sa porte en bois, entièrement cloutée avec d'énormes gonds tout rouillés et un géant loquet.

Tout ce monde circulait, les commerçants, les ménagères, les écoliers.

Il y avait beaucoup de handicapés mentaux et physiques, des idiots, des débiles, des vagabonds, des ivrognes, des clochards, des sans abris, qui se baladaient en toute liberté et que l'on ne voyait pas particulièrement.

Tous ces personnages faisaient partie intégrante de la vie dans le Mellah. 

Attendrissant ces personnages ? 

Ils étaient libres, heureux, acceptés par quelques personnes, ignorés par d'autres.

Étaient-ils différents? On ne se posait pas cette question à cette époque.

Des mellahs, il y en avait partout au Maroc, Rabat, Casablanca, Fès, Meknès, Essaouira, Agadir, etc...

Le Mellah, vous vous imaginez la honte de les ramener à ce temps-là.

Oui les Juifs marocains ont eu un moment de honte de leur passé que représentait le Mellah, devenu dans le langage synonyme de misère, de saleté et d’arriération.

Maintenant que toute la population juive l'a quitté définitivement dans les années 60, il se pare de couleurs de nostalgie et d'affection.

Le temps du Mellah ne sonne plus comme une insulte, mais au contraire comme une invitation à un monde disparu et déjà regretté.

EXODE DES JUIFS DES MELLAHS DU MAROC.

C’était une déchirure pour tout le monde. Les juifs du Maroc, qui étaient là depuis des siècles, percevaient Israël comme un lieu mythique, un paradis, alors que leur pays, c’était ici. Les choses ont changé quand on a permis à l’Alliance israélite mondiale puis à l’Agence sioniste de travailler au Maroc, commençant par cibler les communautés juives les plus pauvres. On a alors exporté les juifs dans les kibboutz. On leur a promis monts et vallées, puis on les a mis au premier front face aux musulmans.

NON. Il n'y a à ce jour plus aucun habitant juif dans les mellahs du Maroc.

Des noms de rues et de boulevards dans tout le royaume vite remplacés après l’indépendance du Maroc par des noms typiquement musulmans.

Exil en «Terre promise»

Après la création d’Israël en 1948, Hassan II, alors prince héritier, avait alors conclu avec des émissaires de l’Etat hébreu un pacte secret organisant leur départ.

En 1967, la guerre des Six jours  a accentué le mouvement. Israël avait, pour convaincre les juifs marocains à s’exiler en «terre promise», invoqué le risque, pour eux, de demeurer dans un pays faisant partie d’un monde arabe devenu plus que jamais hostile.

Sur cet épisode méconnu de l’histoire marocaine, la seule référence acceptée dans les manuels scolaires est celle de Mohammed V, père de Hassan II.

Selon l'historiographie officielle, le grand-père du monarque actuel avait refusé de livrer les juifs marocains durant la Seconde Guerre mondiale et accueilli ceux qui fuyaient le nazisme en Europe.

A la fin de la guerre, le Maroc comptait près de 250.000 juifs. Ils ne seraient aujourd’hui que 3.000.

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Je suis né en mars 1949 à Rabat et j'ai quitté cette ville avec ma famille en aout 1967 pour Paris définitivement.

J'ai apprécié d'avoir vécu de bons moments dans ce pays pendant 18 ans.

Récit écrit en fin décembre 2025.

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