Le bâtiment a été construit au sommet d’une colline dominant la zone dunaire afin d’en surveiller les travaux au mieux.

L’ingénieur Watier n’en vit malheureusement pas l’achèvement, étant décédé dans un accident de voiture en 1922.

La maison de Charles Watier, autrement appelée "la maison du garde forestier", trône toujours dans son style coloniale au milieu des arbres, et surplombant la forêt et les dunes.

Aujourd’hui, l’utilité du bâtiment a disparu mais la maison perdure.

Au bout d’une piste et sur nos indications, vous pourrez pénétrer dans cette enceinte privée, sentir l’âme de ces lieux chargés d’histoire et surtout profiter de la vue époustouflante que vous donne à voir le promontoire érigé à flanc de coteau.

De là, vos yeux ne sauront que choisir entre l’océan à l’infini, la ville d’Essaouira, les dunes reboisées ou les versants couverts de tamaris, lotier, retem, genévrier, acacia et mimosa.

A faire et à revoir, en restant discret sur ce lieu secret qui, nous pouvons le parier, ne le restera pas très longtemps.

Histoire : Charles Watier & Mogador

Né en 1885 dans l’est de la France, il marche sur les traces de son frère ainé en intégrant à l’âge de 20 ans l’école Polytechnique.
Contrairement à son frère qui choisit les Ponts et Chaussées, Charles Watier suit la carrière de son père et choisit de rentrer à l’Ecole forestière de Nancy pour en sortir second de promotion en 1909.
Il débute  comme forestier dans la Grande Chartreuse, et passera ensuite par Fréjus et l’Estérel avant de partir sur le front, la guerre de 14-18 ayant éclatée entre temps.
Son état de santé lui vaut alors une mutation au Maroc, et  c’est en septembre 1916 qu’il arrive sur le continent africain, attaché à titre militaire au service forestier du Protectorat.

Qualifié de fonctionnaire d’élite par sa hiérarchie, il prend poste d’abord à Rabat puis est rapidement désigné pour organiser le service forestier de Marrakech et de Mogador.
C’est d’ailleurs à Essaouira que son nom restera marqué dans l’histoire.
D’abord avec le poste des eaux et forêts qui aujourd’hui encore porte son nom, ensuite parce qu’il est le premier à avoir affronté les dunes et les vents d’Essaouira.

Au début du 20éme siècle, Mogador est menacée par les dunes, le sable gagnant chaque jour du terrain la ville risque de disparaitre. L’administration française consciente de cette menace nomme Charles, Maurice, François Watier à la tête d’un vaste projet de stabilisation des dunes.
Les travaux d’aménagement comprennent l’installation d’un cordon littoral avec la construction d’une dune artificielle permettant de casser les vents et stopper le sable, à cela s’ajoute l’implantation massive de plantes et arbustes : genévrier, thuya, accacia, mimosa… pour limiter le déplacement des dunes.

Ces travaux de fixation des espaces dunaires ont débuté en 1918 et se poursuivront jusqu’aux années 1950 – 1960 avec l’introduction, à cette occasion, dans la région de l’eucalyptus.
Le résultat de cette spectaculaire opération est toujours visible aujourd’hui, la ceinture verte d’Essaouira est un véritable modèle pour les nombreux pays luttant contre le même problème d’ensablement.

Charles Watier ne verra malheureusement pas le résultat de ce projet dont il est l’initiateur, il se tue dans un banal accident de voiture sur la route de Marrakech à l’âge de 37ans.
Aujourd’hui il reste de lui le poste Watier des Eaux et Forêts, un bâtiment situé sur le sommet d’une colline entre Essaouira et Moulay Bourzerktoun. Cette demeure aujourd’hui abandonnée servait à surveiller l’avancée des travaux et elle offre, aujourd’hui encore, à ses visiteurs un point de vue exceptionnel sur la mer et les dunes.

Le Ryad Watier à Essaouira

Autre témoignage de son passage à Essaouira, le Ryad Watier, la maison d’hôtes de la rue Ceuta qui porte son nom. Demeure ancestrale totalement rénovée il y a 8ans, c’est aujourd’hui un hôtel de charme qui abrite 10 suites confortables.
A son arrivée à Essaouira en 2003, Jean Gabriel Nucci, le maitre de maison, choisit d’honorer la mémoire de Watier en donnant son nom au riad qu’il ouvre en maison d’hôtes à Essaouira.
Et quand on pose la question de ce choix à Jean Gabriel, il répond simplement, que c’est l’intérêt personnel qu’il a pour l'histoire de cet homme « dont le destin tragique est enveloppé de mystère », une tentative d'honorer la mémoire d'une personne tombée dans les oubliettes.

De fait, chacune des chambres du Ryad Watier porte le nom d'une personnalité locale demeurée dans la mémoire de la ville : Pinto, Madani, Messaouda ou Cornut, la maison est chargée d’histoires...la suite au prochain épisode !